René Babin

La Jeunesse c. 1960

Bois de chêne
Signé : Babin R 1959
H. 140 ; L. 24 ; P. 23 cm

René Babin entretient tout au long de sa vie une affinité particulière avec la taille directe, alors que cette technique est très peu répandue au milieu du XXe siècle. Elle a cependant connu un renouveau au tournant du XIXe et du XXe siècle avec Georges Lacombe, Constantin Brancusi, Ossip Zadkine ou Joseph Bernard. Dans sa période de formation, René Babin restaure les sculptures des Monuments Historiques et pratique la taille directe de la pierre. Puis, des modèles taillés dans ce matériau jalonnent son œuvre, comme la Femme assise, La Grenade ou La Dormeuse. Souvent, ses œuvres en pierre sont ensuite moulées pour la réalisation d’une édition en terre cuite ou en bronze. Quant aux œuvres sur bois, elles restent rares dans son travail et ne semblent pas avoir été moulées en vue d’une édition.

La Jeunesse a été exécutée dans un chêne de belle couleur ambrée. Les nœuds et lignes du bois, les traces partout laissées par la gouge[1], ainsi que diverses imperfections, tels les clous soulignant un sein ou une inclusion au niveau du pubis, participent à l’expressivité de l’œuvre. La présence des fissures et clous laisse penser qu’il s’agit du remploi d’une poutre. Babin s’adapte à une forme donnée comme les sculpteurs du Moyen-Age roman dont il admire les œuvres. Il en découle une figure élancée et étroite à l’aspect totémique.

Dans le fonds d’archives Babin[2] se trouvent deux photographies collées l’une à côté de l’autre : la première représente La Jeunesse vue de face devant une porte en bois ; la seconde représente une sculpture faite du même matériau, de proportions relativement similaires, et photographiée devant la même porte. Cette deuxième sculpture est probablement une Eve[3] à la pose pudique. Elle est vraisemblablement le pendant de La Jeunesse et est conservée dans une collection privée parisienne. Ses mains se posent d’un geste chaste sur son pubis et son sein tandis que la Jeunesse tient ses bras relevés au-dessus de la tête, offrant ouvertement son corps aux regards.

Alors que René Babin n’a pas encore de monographie, et que sa présence dans les musées et sur le marché de l’art demeure confidentielle, à l’image de sa production, La Jeunesse est relativement bien documentée grâce à :

- une reproduction, vue de trois-quarts dos, dans le Club Français de la Médaille (1976, n°50, p. 206-207).

- la photographie sus-mentionnée du fonds Babin.

- une autre photographie conservée dans le fonds Babin, annotée au verso : “R. Babin bois taille directe jeunesse 1m40 x 0,22 x 0,20”.

- une reproduction de profil, toujours issue du fonds Babin, légendée « Jeunesse (bois chêne) ». Cette reproduction provient certainement d’une plaquette pour une exposition de groupe.


[1] Ciseau droit ou coudé en S ou encore contre-coudé, dont la planche est de forme concave et le tranchant généralement semi-circulaire. (…) Les grosses gouges creuses ou demi-creuses sont utilisées pour le dégrossissage du bois, et plus exceptionnellement des pierres tendres, et les gouges plates pour approcher les formes. (Principes d’analyse scientifique : La sculpture, méthode et vocabulaire, imprimerie nationale, 1978, p.599.)

[2] Le fonds Babin, conservé par la galerie Malaquais, constitué de documents divers, provient du domicile de l’artiste.

[3] D’après les archives du fonds Babin, une Eve en bois mesure 115 x 15 x 15 cm.