Manuel Martinez Hugué dit Manolo

Totote ou Nu accroupi 1909

Épreuve en bronze, n°VII
Fonte au sable, probablement Florentin Godard, entre 1911 et 1929
Monogramme et numérotation (à l’intérieur) : KHVII
H. 9 ; L. 9,5 ; P. 6 cm

Provenance

  • Paris, galerie Kahnweiler
  • Allemagne, collection particulière

Bibliographie

  • 1929 EXPOSITION Manolo, Paris, Galerie Simon, Berlin et Düsseldorf, galerie Alfred Flechtheim, Francfort, galerie Flechtheim & Kahnweiler, 1929, n°6 (un bronze).
  • 1974 BLANCH : Blanch, Montserrat, Manolo, Sculptures, Peintures, Dessins, Éditions Cercle d’Art, Paris, 1974, n°7, p.23, repr. (terre cuite)
  • 1992 BLANCH : Montserrat Blanch, Manolo Hugué, Gent Nostra, Barcelone, 1992
  • 1995 EXPOSITION : Manolo Hugué (1872-1945), Mont-de-Marsan, musée Despiau-Wlérick, 28 juin-4 septembre 1995, Pontoise, musée Tavet-Delacour, 16 septembre-26 novembre 1995, n°2, p. 29, repr. (un bronze, numéro non communiqué)
  • 1997 EXPOSITION : Manolo Hugué, Escultura, Pintura y Dibujo, Madrid, Centro Cultural del Conde Duque, janvier – février 1997.
  • 2005 RAMON : Ramon, Artur ; Vallcorba, Jaume, Album Manolo Hugué, Barcelone, Quaderns Crema, 2005.

Autres épreuves en bronze connues

  • Caldes de Montbuy, collection Mas Manolo
  • Barcelone, collection Josep Maria Ferrer
  • Luxembourg, collection particulière[1]
Manolo réside à Paris entre 1901 et 1909. Il rencontre Jeanne de Rochette aussi appelée Totote à la fin de cette période parisienne : « Dès lors, Totote partagera ses joies et ses peines, lui servira de modèle le cas échéant et saura lui donner à tout moment les encouragements, la confiance en soi et en son art dont il avait besoin » [2].
 
Il existe trois figures de petites dimensions représentant Totote à cette période. La première est une Figure en position génu-pectorale[3] (1907-1909) aux courbes modernistes : puis, Totote nue est réalisée au même moment que Totote vêtue: « […] il créa une curieuse petite figure de femme qui n’a que neuf centimètres de haut (coll. Mas Manolo, Caldas), et dont le volume compact et précis révèle la connaissance de la statuaire égyptienne et mésopotamienne »[4].
 
Ces deux œuvres, reproduites dans les publications consacrées à Manolo, apparaissent comme un temps fort du début de sa carrière ; les deux versions existent aussi en terre cuite. En 1912, il vit avec sa femme à Céret et la portraiture à deux reprises dans un dessin au lavis (Collection particulière), et un buste en bronze (Paris, musée national d’art moderne, en dépôt à Calais, musée des Beaux-Arts et de la Dentelle). Un portrait photographique de Totote par Paul Burty Haviland témoigne de sa physionomie d’alors[5]. Manolo développe son style vers des formes plus géométriques et cubisantes, plus sinueuses et plantureuses, mais on retrouve toujours les mêmes thèmes et postures de femmes assises, recroquevillées, accroupies… Ainsi Totote voit son prolongement stylistique dans la Femme accroupie de 1914.
 
Entre 1912 et 1933, Manolo est sous contrat avec Kahnweiler. C’est l’aboutissement de négociations entre les deux hommes, ouvertes dès 1910. Leur accord stipule que toute la production de Manolo revient au marchand, moyennant une mensualité. Jusqu’en 1920, Manolo reste le seul sculpteur défendu par Kahnweiler, année où Henri Laurens entre dans son cercle très choisi. Les activités commerciales de Kahnweiler sont suspendues par la guerre de 1914-1918, et il rouvre sa galerie en 1920 à une nouvelle adresse (29, rue d’Astorg) au nom de galerie Simon (nom de son associé) jusqu’en 1940, puis galerie Louise Leiris (nom de sa nièce). Manolo dénonce son contrat avec Kahnweiler en 1933, lorsque le marchand est obligé de réduire la mensualité qu’il lui verse, suite à la crise de 1929.
 
Grâce à des recherches réalisées par Elisabeth Lebon, spécialiste des fondeurs de bronzes, nous savons que Kahnweiler, suivant l’exemple de son confrère Ambroise Vollard pour Maillol, fait appel au fondeur Florentin Godard pour éditer les bronzes de Picasso, Manolo ou Laurens. Elisabeth Lebon précise que la collaboration commence en novembre 1911[6] : « De façon semble-t-il non systématique, et récemment découverte[7], Kahnweiler demandait à Florentin Godard de marquer les épreuves qu'il lui commandait d'inscriptions invisibles au spectateur (soit au revers des reliefs, soit à l'intérieur des rondes-bosses) : une numérotation, toujours en chiffres romains, ainsi parfois que ses initiales HK[8], qui apparaissent en relief. Elles marquent sans aucun doute une fonte ancienne du vivant de l'artiste, puisque la dernière commande de Kahnweiler à Florentin Godard date d'avril 1929 ». Comme toutes les épreuves réalisées sous la direction de Kahnweiler au moment où il commence les éditions limitées, notre épreuve n’est pas signée par Manolo. Elle porte les initiales : KH suivi de la numérotation VII en relief à l’intérieur.
 
La date de fonte de l’épreuve de Totote étudiée ici se situe donc, pour prendre une fourchette large, entre 1911 et 1929. Mais, plus précisément, elle date probablement du tout début de la collaboration de Manolo et Kahnweiler, c’est-à-dire, vers 1912.[9]

[1] Porte une étiquette de la Galerie Simon sous la base : "GALERIE SIMON, 29 bis rue d'Astorg, PARIS 8e / 1909 / n°6077 3 / Nu accroupi (30) / Manolo"
[2] 1974, BLANCH, p. 20.
[3] 1974, BLANCH, p. 22, n°6, repr.
[4] 1974, BLANCH, p. 20.
[5] 2005 RAMON, p.68. (La rencontre de Manolo et Totote avec Frank Burty Haviland, le frère du photographe Paul Burty Haviland, dont il fait le portrait en buste, a lieu en 1908 in. 1974 BLANCH, n°5 / Le portrait de Totote par Paul B. Haviland est daté de 1912 in. 1992 BLANCH, p.11 / En 1912, le portrait de Totote par Paul Haviland est publié dans Camera Work ainsi qu’un portrait dessiné de Totote par Manolo.)
[6] Elisabeth Lebon, article « Laurens et le Bronze » in Henri Laurens, Wellentöchter / Daughters of the Waves, catalogue d’exposition, Brême, Gerhard-Marcks-Haus, 30 sept. 2018 - 13 janvier 2019, Mannheim, Kunsthalle, 1er mars – 16 juin 2018, Editions Arie Hartog, Ulrike Lorenz.
[7]A notre connaissance aucune publication n'a encore étudié cette particularité, que nous avons pu constater sur l'exemplaire du MoMA du Verre d'absinthe de Picasso (initiales HK venues à l'envers, sans doute une maladresse du premier essai de Godard qui n'avait pas pensé à les inverser sur le noyau), sur quelques reliefs de Manolo, ainsi qu'une simple numérotation sur des Laurens.
[8]Kahnweiler se faisait appeler Henry. De plus, le petit arrondi du D aurait pu fragiliser le sable du noyau, ce qui peut aussi expliquer la numérotation en chiffres romains, composés de traits bâtons.
[9] 1929 EXPOSITION, n°6 : une exposition à la Galerie Simon en 1929 présente un bronze de Totote daté de 1912.